Sans toi, je n’aurais pas regardé si haut
« Lettre à mon fils aurait pu être un autre sous-titre. Le parc Lafontaine, en un seul mot comme autrefois. C’est ce que j’avais spontanément répondu à Paul, ami poète et éditeur, qui m’invitait – il y a déjà dix ans – à participer à la collection « Lieu dit » qu’il venait de créer aux Éditions du Noroît. «Pourquoi ? Parce que j’y ai passé presque toute ma vie, de la petite enfance à aujourd’hui, et qu’il occupe depuis près de 40 ans beaucoup de place et de pages dans mon travail de création – qu’il est donc déjà lié à l’acte d’écrire. En fait, il se retrouve, conjugué à plusieurs temps – époques et saisons diverses – dans plusieurs de mes livres, et tout particulièrement dans La promeneuse et l’oiseau (1980), Tombeau de Lou(2000), Pendant la mort (2002) et La marathonienne (2004). Comme lieu de refuge ou de liberté, de plaisir ou d’effroi, de promenade ou d’enlisement, de réflexion ou de fuite. «Mais surtout – surtout – parce que tout récemment j’ai pris conscience qu’il était beaucoup plus qu’un lieu à côté duquel j’avais vécu. Qu’il était en fait ma maison, la maison d’enfance ou de famille que je n’ai jamais eue. S’y empilent – comme dans un grenier ou une cave – des tas de souvenirs, des plus intimes aux plus historiques. C’est dans ce cœur francophone de Montréal, en pleine « grande noirceur », entre le monument à L.-H. La Fontaine, les ours noirs de l’ancien zoo et la statue à Dollard, que j’ai entendu pour la première fois le mot “orpheline” ; là que, depuis, la mort n’a jamais cessé de rôder ; là pourtant que l’art et les livres existent. «Or, c’est parce que la mort y a été très présente – comme dans mes livres –, et que mon fils m’en a fait un jour la remarque, que j’ai eu envie de m’adresser à lui dans ce texte, sorte d’autofiction qui comporte deux parties : une première d’une trentaine de fragments disons… archéologiques où s’entremêlent le privé et le collectif, et une seconde où, après Joe Brainard, Georges Perec et quelques autres, je reprends la forme des Je me souviens. » (D.D.)
Le parc. Maison de famille, d’attentes, de désirs, de rencontres, de faits, de fous. Maison forêt et fouillis. Maison du dédommagement et de la consolation, de l’héritage et du deuil. Les images-épreuves du livre de mémoire s’y sont empilées, et chaque nouvel aujourd’hui en rajoute. On les a à sa portée. On peut décider de les revisiter n’importe quand, en dépit du merdier dans lequel elles se trouvent. Les matins d’accablement surtout. Au tempo pressant des misères-chagrins.
Parcours photographique
Denise Desautels
DANS LA PRESSE
« Pas facile de concilier poésie et récit, mais Denise Desautels y parvient sans faute dans son livre […] autant du point de vue de l’écriture qui s’y déploie avec souplesse, remplie d’une émotion à fleur de peau, que du côté visuel.»Hugues Corriveau, Le Devoir, 10-11 août 2013