Où commence le monde
Claude Paradis
J’ai beau noircir les pages et remplir
les cahiers, j’ai conservé le sentiment
de ne pas savoir écrire. La poésie n’est
plus pour moi un jeu d’images,
elle est devenue l’expression
la plus complète de mon âme,
de ce que je peux ressentir ou éprouver.
Je vis une double vie, je traverse
d’une rive à l’autre ; de la solitude
d’un ermite presque misanthrope,
je cours rejoindre l’humanité, dont je tente
de corriger l’élan en m’adressant
à la jeunesse. J’approche pourtant
du moment où je ne serai plus
qu’un vieil ermite creusant son âme.
J’ai beau noircir les pages et les cahiers,
il me reste beaucoup à comprendre
et à étudier de mon humanité.
Je vous écris d’un lieu qui commenceoù l’enfance en moi jamais ne s’achève.Je connais le sol sur lequel les pas s’impriment ;je n’ai pas besoin de marcher pour allervers quoi je vais : le périple de vivrem’y conduit. Cependant, je cherche toujoursune dimension abstraite sur laquelle orienterchaque élan que je donne à ma course,je fouille les marges en quête d’un anglepar lequel attaquer l’infini. Je déchiffreparfois une énigme sous les traits d’un visage ;je vous entends respirer à l’étroit dans vos côtes,et rire soudain de tant de ciels sous le jeudes regards. Le bonheur est un tempsqui revient chaque jour. La poésie me lègueun espace où la vie entière se déroule.De l’enfance puisée à même les yeux, j’ai retenula lenteur des gestes et la dignité des êtres.
Artiste
Éléonore Paradis-Laperrière