L’arbre chorégraphe
L’arbre chorégraphe, c’est là où où le blanc invite le sommeil à prendre sa plume pour la tremper dans la clarté. Là où un lieu s’effiloche dès qu’on s’en approche. Là où un voyageur glisse une photo entre sa peur et sa mémoire future. Là où quelqu’un marche les yeux en blanc et noir. Là où des corbeaux, figés dans le ciel, se prennent pour des parapluies. Là où le silence hurle comme un lance-flammes. Là où danser, c’est donner à l’espace l’occasion de sortir de son habitude d’être là. Là où le danseur prie avant le spectacle. Là où la soif est inconsolable. Là où un toboggan fend le jour. Là où chacun trouve sur son chemin l’œil du soir. Là où le danseur et le voyageur marchent dans la neige d’un souvenir. Là où, derrière le réel, le regard accède à la pensée de l’atome. Là où l’intime se rapproche de l’ultime. Là où un arbre chorégraphie le voyage de la lumière. Là où l’Orient s’interroge : est-ce qu’une chose est bonne parce qu’elle existe ?
Qui n’a pas fabriqué, au sein de ses organes, unepanoplie de cadenas, de retraits, de caillots de verre?S’abandonner : se défaire de cette collectioncoûteuse ?Il n’y a pas que soi dans le sac du monde. Pas quesoi au fond du miroir. Déchirez le sac, cassez lemiroir, vous y découvrirez la multitude.Quand me suis-je abandonné ? Eh bienvoilà : j’y réponds car il y a un lien à faire avecl’expérience poétique.C’est un pays, pas une œuvre, pas une personne,mais un pays – comment dire cela ? – qui m’a sortide mon armure : l’Inde.